mardi 5 mai 2009

3) Lutèce...


Il redescendit la rue, son trésor d’une main et enfonça de nouveau son autre main dans sa poche pour y sentir le trou du bout de son doigt. Comme pour s’assurer qu’il était bien là. Bizarre, il ne l’avait pas senti ce matin en mettant son imper, vérifiant que ces papiers y étaient bien. Il avait pris soin de vérifier que son mouchoir s’y trouvait également. Machinalement, il avait refermé la porte sur lui en sortant et avait glissé sa clef dans la poche de son pantalon. Il faudra recoudre se dit-il, alors qu’il tournait dans la rue des Arènes.
La porte du jardin des Arènes de Lutèce était ouverte. Il allait s’y reposer un instant. Il avait besoin de ça : s’asseoir un moment sur les marches de pierre ou sur un banc, côté jardin. Ne penser à rien… A rien d’autre qu’à l’instant où il savourerait enfin son florentin. Repas frugal qu’il s’accordait pour aujourd’hui. Ses moyens financiers étaient réduits à néant depuis qu’il ne vendait plus. Et tout son argent partait dans des châssis ou des pigments.
L’entrée ombragée découvrait deux remparts de part et d’autres, faisant place à une lumière immense en son centre. Il eût cette impression étrange d’être un gladiateur appelé au combat. Cette vision de lui l’amusa. Avais t’on jamais vu aussi frêle gladiateur en ce Paris si prospère, alors que lui ne l’était pas ? Il opta finalement pour un petit escalier en rondin sur la gauche, qui offrait une place moins exposée. La rosée sur l’herbe indiquait que le soleil, bien que baignant déjà toute l’arène n’était pas encore à son heure la plus chaude.
Le premier banc qu’il dépassa était occupé par une vieille dame et son chien. Il jeta un regard furtif vers eux et continua d’avancer. Le suivant était vide, le troisième également, mais trop à l’ombre à son goût. Il ralentit donc et opta pour faire halte là.
Il s’assit et posa le sachet contenant son florentin près de lui, décidant d’observer un peu autour de lui avant de le manger. Il retardait son repas, sachant bien que ce serait le seul de la journée. Il se remémora alors le temps béni, où il vivait encore chez son oncle et ne manquait de rien. Bien avant de se destiner totalement à son art, bien avant de venir à Paris…